S’il fut un temps où la société ne jurait que par la différenciation des individus selon leurs sexes, aspirations et habitudes de consommation, elle tend aujourd’hui à opérer un véritable tournant. Depuis plusieurs années les initiatives en faveur d’un marketing non genré se multiplient avec de plus en plus de marques souhaitant monter au créneau du « no gender », « gender fluid » ou « gender neutral » et révolutionner les codes de la consommation.

Premier domaine touché ? La mode, évidemment, précurseur du mouvement qui va petit à petit toucher les cosmétiques avant de s’attaquer à un univers bien connu pour son marketing ultra genré : les jouets.

La fin d’un modèle de consommation binaire

Quel que soit le domaine, les modes de consommation ont été pendant très longtemps binaires : d’un côté les produits pour femme/fille et de l’autre, les produits pour homme/garçon. Or depuis peu, les marques semblent se positionner différemment en proposant des produits qui s’adressent indifféremment aux deux sexes. Elles s’éloignent des théories du genre et normes sociologiques pour segmenter leur cible sur des caractéristiques nouvelles telles que leurs comportements, habitudes de vie ou centres d’intérêts.

Un tournant marketing qui exprime une forte volonté des marques d’agir contre les inégalités hommes/femmes, de s’élever contre les déterminismes sociaux et permettant aussi aux marques de se différencier de leurs concurrents.  Avec un marketing tourné vers le « no gender » les marques font en effet le pari de gagner en visibilité comme l’explique Mathilde Lion, experte beauté pour l’Europe du cabinet d’études de marché NPD « Le fait de se positionner sur une niche permet de se distinguer sur le marché et c’est une stratégie qui paye ». Une conviction partagée par Pierre-Louis Desprez, expert en innovation des marques chez Kaos Consulting, qui y voit aussi une belle opportunité commerciale :

« L’attractivité des marques repose sur l’étonnement qu’elles provoquent. Leur volonté de se renouveler, de créer la surprise les pousse donc aussi à investir le créneau des produits non genrés ».

Une tendance « no gender » qui a su conquérir de nombreux domaines de consommation

En premier lieu, la mode : le vestiaire neutre a fait son apparition sur le podium des plus grands défilés (Gucci, Givenchy, Balenciaga, Louis Vuitton) pour finalement s’imposer auprès de nos marques préférées.

H&M a ainsi inauguré, il y a quelques temps, sa première ligne « genderfluid » quant à Zara, elle propose une offre unisexe sous l’étiquette « Ungendered ». Un phénomène « gender neutral » adopté par de nombreuses stars telles que Christine (and the Queens) et Miley Cyrus et qui n’a fait qu’amplifier le mouvement.

Parallèlement certaines marques de cosmétiques aspirent, elles-aussi, à redéfinir les frontières du genre. Des crèmes aux parfums, en passant par les gels douche, l’univers de la beauté s’est réinventé pour proposer des produits plus simples, plus mixtes et plus nomades.

Côté parfum, c’est Calvin Klein qui ouvre la voie avec son célèbre parfum mixte, CK One. Très vite, d’autres grandes marques ont suivi : Guerlain, Bulgari ou encore Thierry Mugler ont ainsi lancé leur ligne de parfums mixtes, tout comme Hermès et ses eaux « à partager ».

Plus récemment, les marques se sont risquées dans un autre domaine : le maquillage. C’est la marque anglaise MMUK Man, qui en 2017, fut la première à proposer une ligne de maquillage exclusivement pour hommes, suivi par Chanel avec sa gamme de maquillage BOY. Puis Givenchy a lancé « Les Mister », une ligne de make-up mixte. L’Oréal Paris a, elle, soutenu le mouvement « Genderless Beauty » en collaborant avec Hari Nef, modèle transgenre, pour sa gamme de fond de teint « True Match ».

Enfin le secteur du jouet semble lui aussi touché par le mouvement, des marques comme Oxybul éveil & jeux travaillent au quotidien pour faire évoluer les représentations en proposant de plus en plus de jeux dégenrés.  Dans le même esprit, l’enseigne de supermarchés Super U a décidé de casser les codes grâce à son catalogue de jouets non genrés. Une opération de « marketing gender » qui fera polémique en 2012 auprès du public mais que la marque renouvellera en 2015, avec un spot publicitaire mettant en scène la réalité des rites de jeux chez les enfants.

Une stratégie gagnante auprès de la génération Y et Z

Selon le site spécialisé dans le marketing Progressive Grocer, qui cite les résultats d’une nouvelle enquête menée par The Cassandra Report intitulée « What Gender Means to Generations Y and Z » : « le marketing genré peut être très rebutant pour bien des consommateurs, particulièrement les moins de 30 ans et les jeunes qui les suivent, alias la génération Z. Ces deux groupes de consommateurs ont largement prouvé que leurs valeurs ne correspondent en rien au genre ».

Il semble ainsi que les générations futures soient attentives aux changements et aspirent à défendre des valeurs plus personnelles, plus « user centric ». Ce qu’ils recherchent : un produit aussi bien adapté aux femmes qu’aux hommes, qui leur correspond à 100% et qui révèle une part de leur personnalité. Une génération qui a donc conscience de repousser les frontières du masculin et féminin, et qui attendent des marques qu’elles en fassent autant.

 Clara FIRMINHAC

Clara FIRMINHAC

Chargée d'études

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