La médiatisation du sport féminin connaît depuis quelques années une accélération à l’échelle mondiale. Elle est portée par :

  • Un intérêt croissant du public pour le sport féminin : records d’audience, affluence du public dans les stades lors d’événements sportifs féminins…
  • L’augmentation de la pratique sportive féminine qui se rapproche aujourd’hui de celle des hommes.

Bien qu’à nuancer si on la compare à celle des compétitions masculines, très majoritaires en termes de diffusion, la médiatisation du sport féminin est très intéressante par sa croissance, ce qui en fait un élément important de l’économie du sport féminin. L’ensemble de la filière sportive l’a bien compris : le sport féminin représente des potentiels de développement importants ne pouvant qu’être favorisés par une médiatisation accrue.

Dans un contexte de saturation chez les hommes avec la multiplication des sponsors qui entraîne une faible visibilité et l’explosion des montants alloués, miser sur le sponsoring féminin favorise un meilleur retour sur investissement. La Coupe du Monde Féminine de football a ainsi été l’occasion pour les marques de profiter d’une médiatisation non négligeable. Le marché des articles de sport féminin a lui aussi connu une progression depuis une dizaine d’années.

Investir dans le sport féminin, c’est également capitaliser sur des valeurs qui seraient différentes de celles du sport masculin. La SNCF a ainsi recherché dans son partenariat officiel de la Coupe du Monde Féminine de football des valeurs « plus familiales et bon enfant (…) en accord avec les [siennes] » comme l’explique Julien Fere, directeur de la communication externe de Voyages SNCF.

Pour GDF SUEZ, suivre les filles de l’Olympique Lyonnais permet de gagner en notoriété mais nourrit également les politiques internes de l’entreprise : management, diversité et mixité. Enfin, les fédérations et clubs sportifs féminins capitalisent également sur l’essor du marché sportif féminin en enregistrant une belle progression de leurs revenus.

Néanmoins, malgré son potentiel économique considérable, l’économie du sport féminin reste fragile.

 

Une médiatisation encore insuffisante pour attirer en nombre les annonceurs

Bien qu’en progression, la médiatisation du sport féminin est encore insuffisante et manque de puissance pour que les marques y investissent plus largement. Or sans médiatisation accrue, l’économie du sport féminin ne peut pleinement se développer.

Pour assurer un véritable essor dans les médias, il faudrait notamment que les collectivités territoriales proposent des solutions pour offrir des infrastructures de qualité, aux capacités d’accueil répondant à la nouvelle affluence.

Par ailleurs, trop peu de sportives de haut niveau sont aujourd’hui médiatisées et ambassadrices de marques, ce qui ne permet pas à la nouvelle génération de s’en inspirer. Plus largement, le sport féminin manque de marques partenaires dont les investissements pourraient lui permettre de croître.

 

Un modèle économique à perfectionner

Pour Sporsora (organisation qui regroupe plus de 150 acteurs de l’économie du sport), le marketing sportif féminin doit encore trouver sa voie, en évitant de tomber dans les mêmes excès financiers que celui des hommes. L’organisation encourage les marques à penser le sponsoring féminin non pas uniquement comme de la visibilité offerte, mais également comme un investissement RSE. Cela est d’autant plus facile qu’aujourd’hui l’image du sport féminin est excellente : peu d’affaires de dopage, corruption ou scandales.

« Soutenir le sport féminin est une manière de se démarquer, de faire preuve d’audace et d’avoir un coup d’avance. Je vois un parallèle évident entre cette prise de risque ambitieuse dans le domaine du sponsoring sportif et la stratégie innovante que nous menons en matière de transition écologique. » explique Gilles Simoncini, directeur délégué Grand Est d’Engie.

Un marché du sport touché par « féminisme marketing » et sexisme

Penser le sponsoring féminin comme un investissement RSE, c’est également s’éloigner de l’opportunisme du « féminisme marketing », où le féminisme devient argument marketing. La place des femmes dans l’économie du sport est en effet le reflet de leur place dans la société. On retrouve donc sur le marché du sport féminin les mêmes enjeux sociaux et sociétaux.

Du côté des publicités, certains stéréotypes restent très prégnants. Durant la Coupe du Monde Féminine de football, nous avions par exemple le choix d’un burger de couleur rose Speed Burger pour encourager les Bleues, ou encore la présence d’une star du football masculin pour rendre les publicités plus attractives.

Surfer sur les événements sportifs féminins, sans tomber dans les pièges du sexisme, n’est pas toujours chose aisée pour les publicitaires ! Il est à noter toutefois que des progrès ont été faits, notamment sur l’esthétique des annonces. La reconnaissance médiatique repose également beaucoup moins sur le côté « glamour » mais prend davantage en compte l’aspect sportif.

Finalement, le sport au féminin porté par une explosion des pratiques, un engouement des femmes pour le sport et la féminisation des instances sportives constitue un potentiel économique certain qu’il reste à structurer grâce à l’engagement de toutes les parties prenantes… et en tout premier lieu, à celui des sportives.

Lorsque performances sportives et spectacles sont là, l’impact ne peut être que positif en termes d’investissement des marques et de médiatisation.

Charlotte LEFEBVRE

Charlotte LEFEBVRE

Chargée d'études